Build - Tony Fadell

Couverture
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Cette fiche de lecture sera courte. Non pas que l’ouvrage mérite peu mais sa lecture est tellement facile et rapide que cela ne vaut pas le coup de le résumer en détail. Il se savoure à l’état brut.

Il y a les romans de l’été qu’on associe avec des livres plus faciles à lire comme des policiers. L’autobiographie de Tony Fadell n’est pas un polar mais elle se lit très bien avec une petite bière de soif ou un rosé piscine sur une chaise longue.

Tony Fadell est le père de l’iPod, le baladeur numérique qui a changé l’industrie musicale avec l’introduction de l’iTunes Store. Il y a un biais du survivant dans ce récit mais je crois que l’auteur arrive à bien différencier son expérience des principes fondamentaux pour créer, et réussir commercialement, un produit ou une compagnie.

Je divise en deux parties l’ouvrage. La première raconte le parcours de l’entrepreneur américain.

Il est tombé très jeune dans l’informatique, et plus particulièrement le côté matériel de l’industrie. Adolescent, Il a créé un petit commerce de vente de pièces détachées pour l’apple ][ (Apple II), puis il s’associe à un de ses professeurs de fac pour fonder une compagnie de jeux multimédia pour enfants. Il rejoint ensuite General Magic, fondée par des anciens d’Apple, puis Philipps pour fabriquer le Velo et Nino, deux PocketPcs. Après un court passage chez RealNetworks, il s’en va chez Apple pour créer l’iPod et puis co-créer l’iPhone. Il va fonder Nest Labs en 2010 qui lancera un thermostat et une ligne d’accessoires intelligents pour la maison. Nest sera vendu à Google en 2014, Fadell quitte l’entreprise en 2016. Son CV est assez impressionnant.

Son premier conseil est de profiter de la liberté qu’apporte la vie de jeune adulte pour expérimenter, de ne pas avoir peur de plonger dans l’inconnu. Son parcours témoigne de prises de risques qui ont payé. Quand le monde de la Silicon Valley était pris dans la bulle des business en ligne de la fin des années 1990-2000, il est resté plus concentré sur le monde hardware qui était vu comme un peu vieux jeu.

Il insiste aussi sur la nécessité d’élargir ses horizons au sein même de l’entreprise pour laquelle on travaille. C’est-à-dire de parler régulièrement à des fonctions en-dehors de son équipe (marketing, finances, etc) pour se préparer à des fonctions aux responsabilités plus étendues.

Il aborde la grande question de rester contributeur individuel versus devenir un gestionnaire (manager). Quand on devient manager on laisse derrière la liberté du poste individuel qui permet de creuser un sujet sans se préoccuper de quelqu’un d’autre. Le rôle du gestionnaire est d’aider les membres de son équipe à atteindre des résultats. Le danger quand on devient le gestionnaire dans un domaine qu’on maîtrise est de devenir un micromanager. C’est une question de dosage car il faut parfois rentrer dans les processus, dans le « comment », quand il y a un problème mais il faut savoir en sortir aussi une fois que l’équipe est retournée sur les rails.

La deuxième partie est plus orientée sur les aspects de la création d’entreprise et le rôle d’un PDG. Mais ce qui m’a le plus intéressé dans cette partie, ce sont les chapitres liés à la gestion de produit.

On parle souvent du job-to-be-done, d’outcome etc. Tony Fadell parle du « Pourquoi » mais le pourquoi des anti-douleurs et non le pourquoi de vitamines. Ce dernier est la source de gadgets qui sont cools mais dont personne ne se sert, General Magic était sans doute dans cette catégorie. Le premier résout un problème. Autour de ce pourquoi on construit un histoire qu’on répète à son équipe, ses partenaires, sa famille pour l’affiner. On connaît la fameuse présentation (transcrit plus bas) de Steve Jobs le jour de la sortie de l’iPhone, il l’a déroulée comme si c’était naturel mais cela venait de plusieurs années de « répétitions ».

Pour la première version d’un produit, on parle peu aux clients car il n’y en a pas. Cela viendra plus tard. Pour le prototype on construit des clients types, des personae. Dans le cas de Nest, il y a l’homme qui est attiré par les nouveautés technologiques et son épouse qui est plus réticente à introduire un objet intelligent dans la maison.

La vision est importante pour la version 1 car c’est là qu’on va inventer un nouveau modèle d’affaire, appareil, etc. Mais après pour la deuxième version, on doit itérer basé sur des données des retours clients. Un exemple avec l’iPod sur lequel Steve Jobs ne voulait pas que cela soit compatible avec Windows car il le voyait comme un levier d’achat pour les Macs. Mais, même si les premières versions d’iPod étaient un succès d’estime, les ventes n’étaient pas au rendez-vous car les gens ne voulaient pas acheter un mac pour juste écouter la musique. Steve Jobs a changé d’avis avec ces données du marché.

La troisième version est là pour optimiser les processus et les indicateurs économiques. L’entrepreneur résume très bien le propos par ces 3 points:

S’il y a bien un sujet polémique dans le monde produit c’est le poste de gestionnaire de produit. J’en ai déjà parlé dans ma fiche sur Inspired de Marty Cagan mais Tony Fadell ajoute sa pierre à l’édifice. Je reproduis intégralement sa définition avec mon emphase.

Product marketing and product management are essentially the same thing—or at least they should be. A product manager’s responsibility is to figure out what the product should do and then create the spec (the description of how it will work) as well as the messaging (the facts you want customers to understand. Then they work with almost every part of the business (engineering, design, customer support, finance, sales, marketing, etc.) to get the product spec’d, built, and brought to market. They ensure that it stays true to its original intent and doesn’t get watered down along the way. But, most importantly, product managers are the voice of the customer. They keep every team in check to make sure they don’t lose sight of the ultimate goal-happy, satisfied customers.

Sur l’aspect du message produit, il donne même un modèle qui prend la forme d’un document qui détaille le pourquoi et le comment:

Il y a bien d’autres chapitres qui sont dédiés à l’organisation de la compagnie au fil du temps et de la croissance, de l’importance des services d’un avocat etc. Ils sont intéressants à lire car on sent la sueur derrière les conseils prodigués en si peu de pages. Il y aussi le clash de culture avec Google après le rachat de Nest (et son équipe dirigeante ), “Fuck Massages” qui est le titre d’un des chapitres résume bien le propos. On ricane à sa lecture.

Voici le texte de la présentation de Steve Jobs.

This is the day I’ve been looking forward to for two and a half years.

Every once in a while, a revolutionary product comes along that changes everything and Apple has been—well, first of all, one’s very fortunate if you get to work on just one of these in your career. Apple has been very fortunate. It’s been able to introduce a few of these into the world.

In 1984 we introduced the Macintosh. It didn’t just change Apple. I changed the whole computer industry.

In 2001, we introduced the first iPod. And it didn’t just change the way we all listen to music, it changed the entire music industry.

Well, today we’re introducing three revolutionary products of this class. The first one is a widescreen iPod with touch controls. The second is a revolutionary mobile phone. And the third is a breakthrough internet communications device.

So, three things: a widescreen iPod with touch controls; a revolutionary mobile phone; and a breakthrough internet communications device. An iPod, a phone, and an internet communicator. An iPod, a phone… Are you getting it?

These are not three separate devices, this is one device, and we are calling it iPhone. Today, Apple is to going reinvent the phone, and here it is.

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