Democratizing the Constitution: Reforming Responsible Government - Peter Aucoin, Mark D. Jarvis, Lori Turnbull

Dans ma quête d’informations sur le Canada et le Québec après le livre polémique sur l’économie et les dernières élections j’ai pu lire un ouvrage un peu plus académique.

Le Canada a eu une vie politique un peu mouvementée lors de notre arrivée en 2009, il était donc un peu difficile de comprendre les tenants et les aboutissants. Mais tout est devenu limpide après la lecture de ce livre. Non seulement il m’a aidé à appréhender le système parlementaire canadien mais aussi les enjeux des dernières manœuvres politiques.

Les électeurs n’élisent pas directement la branche exécutive mais un parlement dont est issus non seulement le Premier Ministre mais également les ministres. Donc dans le caucus du parti politique vous avez les représentants faisant partis du gouvernement mais aussi les autres députés « backbench ». Cela fait partie de l’emprise du Premier Ministre sur les députés : la distribution de ministères, de secrétariats et de directions des commissions parlementaires sans compter la désignation des candidats dans chaque circonscription qui est à la discrétion du chef de parti.

Mais les exemples les plus frappants de l’hégémonie du poste sont survenus ces 4 dernières années. Stephen Harper est devenu PM en 2006 avec un gouvernement minoritaire, chose inconnue en France. Dans cette perspective, son parti n’ayant pas de majorité au parlement, il doit négocier chaque vote avec l’opposition pour atteindre une majorité. Cela diffère de la coalition car les partis d’opposition ne participent pas au gouvernement (contrairement à ce qui s’est passé en Angleterre en 2010 avec le gouvernement Cameron-Clegg). Le mode de scrutin a un tour (celui qui a le plus de votes est élu avec ou non la majorité) favorise une distorsion entre le vote populaire et le nombre de sièges. En 2011 le Parti Conservateur avec 39% des voix a obtenu 166 sièges sur 308 (53%).

Le terme du parlement est de 5 ans au maximum mais sans date fixe, le premier ministre a le droit de demander au Gouverneur Général de dissoudre et proroger le parlement à tout moment. Le Gouverneur peut refuser mais cela n’est arrivé qu’une fois en 1926 quand le gouverneur Byng a refusé la dissolution requise par le PM King et a demandé aux partis d’opposition de former un gouvernement.

Un Premier Ministre peut donc appeler des élections à tout moment donc surtout quand cela arrange son parti, on parle de de « snap elections ». Pour y remédier, Stephen Harper a proposé une loi qui fixe la date des élections tous les 4 ans. Mais l’élection prévue en octobre 2009 n’a pas eu lieu car Harper va dissoudre le parlement en septembre 2008 – les dates fixes ne s’appliquant qu’aux gouvernements majoritaires….

Le deuxième incident constitutionnel survient 3 mois après, en décembre 2008. L’opposition s’apprête à voter une motion de non-confiance lors de l’une des journées prévues pour l’opposition (dont le calendrier est décidé par le PM !). Mais le PM va nous seulement repousser cette journée mais demander au gouverneur général de suspendre le gouvernement pour 1 mois. Pendant ce temps la coalition d’opposition a le temps de se séparer et le gouvernement, lui, évite de tomber. Le Playmobil Harper est un animal politique … La troisième manœuvre date de décembre 2009 quand Harper demande la prorogation jusqu’en mars 2010 pour éviter le débat sur la question du traitement des prisonniers afghans par les forces Canadiennes.

Ces exemples ne sont que les plus récents (et certains diront les plus “audacieux”). D’autres premiers ministres, libéraux ou conservateurs, ont abusé de leurs pouvoirs. Les auteurs proposent de s’inspirer d’autres systèmes parlementaires dits « Westminster » pour balancer le pouvoir avec le parlement:

Ce livre de 250 pages contient beaucoup d’informations pour le néophyte en moi. Le ton est académique mais loin d’être ennuyeux, les répétitions et reformulations permettent de bien d’imprégner de la logique derrière la constitution élaborée en 1867 puis 1982. Je suis presque armée pour les prochaines élections de 2015, il manque plus que la citoyenneté :)

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