Juliette Drouet

Durant la fin de semaine, j’écoute, via son podcast, “Concordance des temps” une émission animée par Jean-Noël Jeanneney. Cette semaine était consacrée à Juliette Drouet, ancienne actrice et compagne pendant presque 50 ans de Victor Hugo.

L’invitée, Florence Naugrette, a écrit une biographie mais dirige aussi une équipe éditoriale qui a numérisé et annoté les 22 000 (!) lettres et mots écrits par Juliette Drouet à Victor Hugo. On peut consulter le résultat en ligne sur ce site.

Leur relation ne fut pas des plus simples, Victor Hugo avait non seulement une femme et des enfants mais aussi plusieurs autres maîtresses. Mais Juliette sera plus forte et restera proche de lui, surtout durant son exil à Guernesey. Ce qui aurait pu paraître comme une relation de dépendance (à cette époque les actrices sont souvent des prostituées ou courtisanes qui sont entretenues par leurs amants) est plus compliquée et l’entrevue rends bien justice à cette femme. Elle inspire Hugo par son parcours (notamment pour Les Misérables), elle vient d’un milieu très modeste. Elle est aussi son lien vers des acteurs de la révolution de 1848.

Je suis content que ses écrits soient disponibles en ligne, on peut y naviguer pour apprécier tranquillement la profondeur de ce personnage méconnu de notre histoire.

Voici la lettre du 17 février 1863 qui marque leur 30 ans de relations.

Rebonjour, mon bien-aimé, en plein jour, en plein soleil, en pleines restitus, en plein amour et en plein bonheur, bonjour et rebonjour comme il y a trente ans quand mes yeux te suivaient sur le boulevard au moment où tu venais de me quitter et que mon âme t’envoyait des volées de baisers pendant que tu te retournais pour me voir encore une fois à ma fenêtre avant de passer la rue du Temple. Ce souvenir pour moi est ineffaçable, je peux dire que tout est encore à la même place et dans le même ordre dans mon cœur depuis la première nuit où je me suis donnée à toi. Ces trente années d’amour ont passé dans ma vie comme un seul jour d’adoration non interrompu et je me sens plus jeune, plus vivante, plus forte pour t’aimer que je l’aie jamais été, cœur, corps et âme. Tout est toi et ne vit que par toi et pour toi. Je te souris, je te bénis, je t’adore.

Juliette Drouet lithographiée par Alphonse-Léon Noël, 1832.
Juliette Drouet lithographiée par Alphonse-Léon Noël, 1832.

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