Notes de lecture du livre La société de défiance de Yann Algan et Pierre Cahuc
Ce petit livre d’une centaine de pages peut vous apprendre beaucoup ou pas. En fait il tente d’expliqur ce que beaucoup de monde sait ou ressent dans la compréhension de la société française. Je parle de cette impression d’éternelle confrontation syndicats/entreprises/Etat/parlements et les relations de ces derniers avec les citoyens. Ce ne sont jamais des histoires de compromis mais de conflits.
Les auteurs tentent d’expliquer, et ceci avec beaucoup de réussite, que le manque de confiance des uns envers les autres et l’incivisme sont à l’origine de beaucoup de problèmes et surtout des obstacles aux résolutions des problèmes que tout pays rencontrent.
Il y a beaucoup de graphiques très claires pour comparer la France et d’autres pays sur un certain nombres de paramètres. La plupart sont des enquêtes effectuées dans plusieurs pays sur les valeurs telles que
- la confiance envers les acteurs du marché : Part des personnes qui déclarent “n’avoir aucune confiance envers le parlement” : France 25%, 20ème sur 24 avec la Turquie ou le Mexique derrière elle (Norvège : 5%) . On est dans le même ordre d’idée pour la justice ou les syndicats
- la notion de défiance : Part des personnes qui répondent “Il est possible de faire confiance” à la question “En règle général pensez-vous qu’il est possible de faire confiance aux autres ou que l’on est jamais trop méfiant ?” : France 21% avant-avant-dernier de la liste des 20 pays interrogés. En comparaison la Norvège est à 66%
- la notion d’incivisme : Part des personnes qui déclarent “trouver injustifiable de réclamer indûment des aides publiques “ : France 38% , dernière derrière le Mexique. Danemark 89%.
Bien sûr on est dans le déclaratif mais les écarts sont assez marquants : on est pas un pays où la confiance règne.
Les auteurs nous apprennent que cela n’a pas été toujours comme ça. En comparant les sondages efectués auprès des immigrants aux USA d’origine européenne on retrouve les mêmes ordres de grandeur sauf pour les français d’avant second guerre mondiale : ceux-ci se faisaient plus confiance les uns envers les autres.
En comparant ensuite les systèmes de protection sociale (assurances maladie, chômage …), on voit que le système français, corporatiste, a favorisé sur le long terme les conflits, les différentes corporations défendant leur intérêts propres. C’est celui qui crie le plus fort parmi les 14 systèmes de retraites qui a raison …. Au contraire d’autres pays (dont les pays scandinaves) ont choisi une approche universaliste où la totalité ou presque de la population a le même statut vis-à-vis des prestations sociales.
Le deuxième trait du système français réside dans l’étatisme : il n’y aucune délégation par exemple aux syndicats dans la fixation du salaire minimum. Tout se fait au niveau de l’Etat avec un salaire unique pour tous les secteurs. Dans les pays moins centrallisé, le salaire minimum est parfois même en-dessous mais la confiance étant plus élevée les vraies négociations s’effectue dans les branches, secteurs, là où les syndicats ont une connaissance plus fine que l’Etat des enjeux.
On ne reviendra pas sur la relation des français et du marché, les auteurs rappellent ici deux exmples frappants : les taxis et les hypermarchés. Les français voient en partie leur pouvoir d’achat diminué depuis des années pour protéger les rentes d’un secteur. Et ceux-ci n’est pas le fait de grandes entreprises étrangères qui imposeraient leur vues en France.
Il n’y pas de solution miracle et je doute qu’il faille un seul président ou présidente pour rétablir cette confiance qui manque tant dans le débat public. Non c’est un travail de fond pour un parti politique par exemple. Un parti nouveau, décomplexé, qui puisse allé de l’avant. Rendez-vous en novembre 2008 ?
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