Notes de lecture du livre Nos richesses de Kaouther Adimi
Court roman qui m’a fait découvrir une période de l’Algérie occupée par les français que je ne connaissais pas trop: la scène littéraire des années 30 aux années 60. L’originalité tient du mélange entre l’histoire d’un personnage réel, Edmond Charlot, éditeur qui a ouvert une librairie et maison d’édition en 1936 à Alger et un personnage fictif, Ryad, qui occupe la librairie de nos jours mais pour la démanteler suite à sa vente.
Ryad revient à Alger, une ville qui ne connaît et n’apprécie pas beaucoup. La librairie qui est devenue une annexe oubliée de la bibliothèque nationale a été cédée à un commerçant qui va en faire un magasin de beignets. Ryad est une connaissance de cette famille et se voit charger de la remettre en état avant de repartir pour Paris où l’attend sa vie.
Il fait la connaissance des gens du quartier, qui ne voient pas d’un bon œil sa venue mais ne sont pas non plus très hostiles. Il tisse des liens avec Abdallah qui était l’unique employé de la bibliothèque. On l’a même un peu oublié dans son poste et maintenant il préfère rester dormir dans un local du restaurant adjacent.
En parallèle, on apprend l’histoire de la librairie et surtout de la maison d’édition par le journal tenu par Edmond Charlot. Ce sont de courtes entrées chronologiques qui racontent sa vie d’entrepreneur. Celle-ci n’est jamais facile: la censure, la guerre, les problèmes d’approvisionnement, les finances etc. Mais il est aussi entouré d’écrivains qui sont ou seront plus tard de grands noms : Albert Camus, Jules Roy, Max-Pol Fouchet etc. Il y a une certaine effervescence qui est bien communiquée dans le texte. Cette dernière contribue aussi à son échec parisien quand il s’installe dans la capitale à la fin de la guerre avant de revenir à Alger jusqu’en 1962.
Je reproduis ici la dernière entrée avec ce conseil pour les aspirants écrivains.
19 octobre 1961
Un journaliste qui prépare un reportage sur Camus — un de plus — m’a demandé s’il y avait des gens que j’avais incité à écrire. Il n’y en a pas qu’un, il y en a des quantités. Je lui ai donné ma recette :
Achetez une table, la plus ordinaire possible, avec un tiroir et une serrure. Fermez le tiroir et jetez la clé. Chaque jour, écrivez ce que vous voulez, remplissez trois feuilles de papier. Glissez-les par la fente du tiroir. Évidemment sans vous relire. À la fin de l’année vous aurez à peu près 900 pages manuscrites. À vous de jouer.
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