Notes de lecture du livre Sustainable Energy - Without the Hot Air de David JC MacKay
Le débat sur les sources d’énergies et leur utilisation est complexe. On voit beaucoup de chiffres dans la presse qui nous font peur ou au contraire nous laissent complètement indifférents car durs à interpréter. Le livre de David MacKay est un très bon remède à ce problème, il donne des explications techniques très poussées tout en restant très abordable et agréable à lire.
Le constat
Il y a quelques années un site web se proposait de ramener toutes les statistiques mondiales à un village de 100 habitants ce qui permettait de mettre à une échelle plus humaine certains chiffres et de faire ressortir des proportions cachées par la grandeur de certains autres.
Le scientifique anglais a fait un peu la même chose en ramenant les tendances énergétiques à l’échelle d’un pays (dans son cas le Royaume-Uni) puis à celle d’un foyer. Il prend une approche très didactique commençant par mettre en comparaison notre consommation d’énergie (transport, chauffage, vie quotidienne, etc.) et en face les moyens de production d’énergies renouvelables (éolien, hydroélectricité, solaire, etc.).
Puis de chapitre en chapitre, il va mettre des chiffres en face de chacune de ces entrées. En commençant par les principales utilisations puis après en examinant le potentiel maximum de chaque source d’énergie renouvelable que peut offrir le territoire britannique. Pour chaque activité ou source d’énergie, l’auteur utilise le kW/h qui est une unité facile à comprendre. On arrive à un équilibre presque satisfaisant avec un total de 125 kW/h par personne par jour.
Sauf que bien que nous soyons tous pour une place plus grande des énergies renouvelables, quand il est temps de payer ou de les installer, le débat devient de suite plus compliqué. L’écart entre les projections et la réalité est alors frappant: 125 pour la consommation, 18 pour la production.
Les pistes de solution
Là encore le scientifique britannique y va par étape. Il écarte de suite les petites solutions comme débrancher son chargeur de téléphone. On rejoint un débat qui est d’actualité: culpabiliser les individus pour détourner l’attention sur les changements nécessaires qui nécessitent une action forte des pouvoirs publics.
L’exemple du parti conservateur britannique est frappant. Dans son programme sur l’écologie on pouvait lire :
« Un chargeur de téléphone mobile consomme en moyenne environ 1 W, mais si les 25 millions de chargeurs de téléphones mobiles du pays étaient tous laissés branchés, ils consommeraient assez d’électricité (21 GWh) pour alimenter 66 000 foyers pendant un an. »
66 000 semble un chiffre énorme mais en fait cela ne représente que 0.25% du total. Pour résumer : Si tout le monde fait un peu, nous n’accomplirons qu’un peu.
Pour vraiment faire une différence il faut penser grand. Cela passe par changer son style de consommation, améliorer l’efficacité énergétique des 3 grands blocs: les transports, le chauffage et l’usage électrique de nos appareils de tous les jours.
Transports: une plus grande place des transports en commun et des vélos, l’usage de voitures électriques et du train.
Chauffage: une meilleure isolation des maisons, une meilleure utilisation des des thermostats et enfin l’utilisation de l’énergie solaire thermique (à ne pas confondre avec le solaire photovoltaïque) et de pompes à chaleur.
Enfin l’efficacité énergétique est importante car elle peut contre-balancer l’augmentation du nombre d’appareils et donc l’augmentation naturelle de notre consommation.
Décarbonisser passe donc par électrifier beaucoup de nos usages énergétiques, voici un schéma qui résume bien ces 3 actions:
Du côté de la production, l’auteur aborde l’énergie nucléaire qui est devenue un peu solution fétiche des gens de la Silicon Valley mais qui pose d’autres problèmes comme l’extraction de l’uranium. On ne parle pas des autres énergies fossiles comme le charbon “propre” qui sont au moins un stopgap.
Chaque pays n’aura pas les moyens et la capacité de répondre à sa demande d’énergie si on veut la rendre propre. D’où le besoin de mutualiser la production avec des projets comme des fermes solaires dans les déserts, avec une taille énorme (environ un pays comme l’Allemagne) ou plus petite si on tolère un mix d’énergies renouvelables et de nucléaire par exemple.
L’auteur présente 5 plans pour répondre au besoin de l’Angleterre :
Le plan M est celui du compromis et peut-être un des plus réalistes:
La solution passe aussi une révolution dans la façon dont nous construisons et gérons le réseau d’électricité. Les énergies renouvelables les plus populaires (éolien et solaire) sont dites intermittentes. On a besoin de pouvoir stocker le surplus d’énergie générée dans un moment de la journée (le midi pour le solaire) pour l’utiliser lors d’un autre (le soir ou le matin).
On a des techniques qui marchent très bien comme l’utilisation de bassins d’eau en altitude qui utilise des pompes pour amener l’eau d’un bassin plus bas équipés de turbines pour générer l’électricité le moment voulu.
On voit aussi de plus en plus de systèmes de batteries pour maison qui permet de stocker et remettre dans le réseau de l’énergie quand celui-ci a une forte demande.
Enfin il ya aussi des systèmes de gestion de la demande (“demand response”) qui permet aux fournisseurs d’électricité de déplacer de la demande ou de la réduire lors des pics de consommation.
Conclusion
Je ne voudrais pas trop simplifier les détails qu’on peut trouver dans cet ouvrage. J’espère toutefois avoir éveillé votre curiosité sur ce débat important mais au combien obscurci par la tonne d’informations à laquelle nous sommes confrontés.
Le livre est accessible gratuitement sur le site Internet dédié dont une version française. Il date de 2006 donc certains chiffres ne sont peut-être plus d’actualité mais je pense que la thèse de l’auteur reste valide.
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