Redécouverte de Chris Arnade

Je ne sais plus trop comment j’ai découvert le travail du photographe américain Chris Arnade. Peut-être par hasard sur Flickr où il était très actif ou via un profil dans le New York Times.

Analyste financier et “trader” à Wall Street, il a quitté cette profession pour sa passion, la photographie de rue avec un focus (désolé!) sur la vie des gens démunis dans le Bronx à New York. J’avais beaucoup de plaisir à suivre son travail. Je le trouve similaire à celui de Jeff Sharlet qui poste sur Instagram des portraits de la frange pauvre de la population américaine.

Quand l’élection de Trump est survenue en 2016, le travail de Chris Arnade est devenu encore plus politique. Il fut un des acteurs du débat sur la responsabilité des élites démocrates dans leur défaite notamment par leur mépris apparent pour la classe des travailleurs blancs, victime des politiques de libéralisation des décennies précédentes. C’est à ce moment-là que j’ai un peu décroché. Non pas par principe mais Trump devenait un gouffre d’attention qui est sans fond et Chris Arnade était très engagé dans ce combat.

Il y a quelques mois je suis tombé sur sa newsletter, Chris Arnade Walks the World où il documente ses explorations urbaines dans le monde. Il passe quelques semaines dans une ville où il évite les attraits touristiques pour se concentrer sur des quartiers souvent plus modestes. Il marche beaucoup tout en utilisant aussi les transports en commun. Il fréquente le même bar ou restaurant car cela prend du temps pour s’imprégner d’un endroit, d’une ambiance de quartier. Je ne suis pas abonné payant donc je ne peux juger de la qualité de l’ensemble mais le peu que je lis me suffit et c’est d’un très bon niveau.

Quelques exemples d’éditions que j’ai appréciées :

Il aborde peu l’actualité chaude des réseaux sociaux sauf dans ce billet, Why the US can’t have nice things, que j’ai trouvé très pertinent.

Cela part d’une polémique sur une pièce de mobilier urbain pour arrêt de bus à Los Angeles censée apporter de l’ombre. Le pilote a été ridiculisé sur Twitter pour son côté “gimmick” qui n’adresse pas le fond du problème (des arrêts de bus confortables). Chris Arnade qui fréquente beaucoup les systèmes de transport en commun lors de ses périples fait remarquer, à juste titre, que la solution proposée est emblématique d’un problème plus large dans la société américaine :

It’s only in the high-regulation low-trust society (ours), that you end up building the least to protect against the worst — the constraints of both regulations and behavior results in things the majority doesn’t want, or doesn’t find useful.

This is why there are so few new functional things in US cities and why what is built feels “cold.” Regulations limit bottom-up and top-down solutions, and then what is built has to protect against all sorts of bad behavior — limiting functionality and “warmth.”

The high-regulation part of the US is usually couched in the language of safety, but it’s really about not allowing organic growth, which is messy, but people being people, results in things the majority really wants.

Quito is the perfect example. If there is a bus stop in the middle of nowhere, without natural shade around, riders will do something like rig an umbrella to a pole, or throw some old seats under a tree. In the US those will be dismantled within days.

Germany, and much of northern Europe, is an example of a high-regulation high-trust society (compared to the US), where nice fully functional things can be built, without fear of misuse.

Turkey is an example of a low-regulation high-trust society (compared to the US), that because of less concern about new things being destroyed, is building plenty of nice new things, while also continuing to allow the bottom-up organic growth that’s defined it for so long.

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