Notes de lecture du livre The Master de Colm Tóibín
L’auteur, Colm Tóibín, est connu pour son roman Brooklyn qui a été adapté au cinéma en 2015. Contrairement à ce dernier, The master n’a pas comme sujet son pays natal, l’Irlande, mais un de ces fameux descendants: Henry James. La famille irlandaise de l’écrivain a émigré en Nouvelle-Angleterre à la fin du 18ème siècle. On y retrouve toutefois une thématique: la comparaison de la bourgeoisie anglaise à celle des États-Unis et, dans une autre moindre mesure, celles des autres pays européens. Mais c’est surtout un livre sur la vie intérieure de l’artiste.
C’est un roman qui couvre 4 années de la vie du romancier américain, de 1895 à 1899. Sa carrière est déjà bien entamée, certains pourraient dire qu’elle même sur le déclin avec ses meilleurs ouvrages derrière lui. C’est un habitué de la vie mondaine de Londres, on l’invite en tant qu’écrivain qui n’a jamais eu un grand succès populaire mais qui a un talent indéniable. Je le vois comme un philosophe dont on attend des déclarations profondes et parfois mystérieuses sur la vie. Son statut d’immigrant du nouveau monde lui confère aussi une aura spéciale.
L’histoire commence avec un échec cuisant: celui de sa première, et dernière, pièce de théâtre. Il s’en va alors en Irlande où il est hébergé par l’élite militaire anglaise. C’est la première fois que l’auteur évoque sans la mentionner explicitement l’homosexualité de James. Elle prend la forme d’un valet militaire qui lui est attitré par la maîtresse de maison qui n’est pas dupe et joue même avec.
Chaque chapitre couvre une période de ces 4 années avec des épisodes importants de sa vie. Celle-ci n’est pas recluse car il voyage et reçoit beaucoup mais dans son for intérieur il ressent une certaine tristesse. Il y a le manque de succès plus populaire mais surtout, au fur et à mesure que l’histoire , les personnes qu’il a laissées derrière. Sa sœur Alice, sa cousine Mitty puis son amie et auteure Constance Fenimore Woolson. Elles sont toutes mortes. Les amis lui reprochent à demi-mots de les avoir abandonnées au moment où elles avaient le plus besoin de lui. Mais lui aussi avait besoin de s’échapper de sa famille puritaine et son départ pour l’Europe lui a permis de confirmer sa vocation.
Le livre est parsemé de ses voyages à Paris, Florence, Venise, Rome et dans sa nouvelle maison à Rye quand il décide de quitter Londres pour la province. Henry James est issu d’une famille aisée. L’héritage de son père lui permet de vivre confortablement même s’il doit continuer à produire pour assurer son avenir financier. C’est aussi une raison de son détachement personnel, il en a besoin pour écrire. Le travail d’écrivain est très demandant. On assiste ainsi à ses réflexions sur les personnages et histoires qu’il envisage de mettre sur papier. Il ne sent pas vraiment de culpabilité et il a une très forte idée de son indépendance qui lui est nécessaire selon lui pour écrire.
J’ai beaucoup aimé ce roman. Les personnages autour de James sont très bien décrits. Les dialogues lors des soirées mondaines sont drôles. Il est intéressant de voir décrire ces bourgeois anglais et américains qui se retrouvent dans les capitales européennes. Le séjour de quelques mois en Italie est comme un passage obligé dans leur éducation. La dernière partie avec la visite de la famille de son frère nous fait passer par toutes les émotions: rivalités entre frères, tendresse mais aussi connivance.
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